Actes racistes et homophobes dans le sport : peut-on lutter à petite échelle ?

« Le sport est un vecteur de respect, de citoyenneté, de tolérance. » Cette phrase résonne comme la plus forte au sortir de notre entretien avec Arnaud Kenigsberg, chargé de mission sport à la Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme (LICRA). Si cette phrase est exacte par définition, elle implique un revers de la médaille important. En effet si ces valeurs ont toujours fait la force du sport en général, son aspect populaire le rend sujet aux actes racistes. Aujourd’hui, tous les problèmes d’inégalités sont dus au caractère public du domaine. Et quand on parle d’une matière aussi populaire que le sport, évidemment l’ampleur est énorme. Quelles soient de type raciste ou même homophobe, les violences sont étroitement liées à la visibilité du sport en question, et donc à son rayonnement.

Simplement comment faire pour lutter contre le racisme et l’homophobie dans le sport ? De son côté, la LICRA coordonne les actions organisationnelles, reçoit et traite les plaintes et assure le relai français de l’association FARE (Football Against Racism in Europe). D’autres associations comme la FSGL (Fédération Sportive pour les Gays et Lesbiens), s’occupe de tout cela en termes de violences homophobes. Mais les actions individuelles peuvent-elles porter leurs fruits ? Est-il possible de freiner le racisme et l’homophobie en agissant à la plus petite des échelles ?

Déjà, il faut bien comprendre la synergie entre la démocratisation d’un sport et le nombre des actes racistes qui y sont affiliés. M. Kenigsberg nous précise que si 100 actes ont été répertoriés par la LICRA en 2010, c’est une infime minorité compte tenu du pourcentage d’actes qui ne sont pas dénoncés. C’est le premier levier d’action disponible pour tous. Les actes racistes et homophobes ne sont que trop rarement révélés aux associations. Alors lorsqu’on est témoin d’un de ces actes, que ce soit sur un lieu d’entraînement, dans un stade ou tout simplement en loisir, il faut garder en tête que la victime n’ira peut-être (sans doute ?) pas raconter l’agression.

Deuxième levier d’action, éviter les effets de masse. Moins médiatisés que les actes racistes dans les stades par exemple, les lynchages dans les centres d’entraînements sont pourtant très nombreux. Et dans ce cas, la principale faute, c’est de penser que « ce n’est pas grave, ce n’est que de l’humour ». Les moqueries peuvent faire partie de l’humour, mais il faut s’assurer que tout le monde, et donc surtout la cible des quolibets, l’entend de cette manière. Oser s’interposer face à la masse et prendre parti pour défendre la victime peut-être primordial, car cela peut inciter d’autres personnes qui ne disent rien uniquement pour faire comme le groupe. De plus, cela peut convaincre la victime de dénoncer ces actes, ou même d’autres commis auparavant.

Evidemment, l’endroit où les actes racistes sont les plus visibles reste les stades de football. Encore une fois, il faut se rappeler de la connexion entre le caractère populaire d’un sport et le nombre des actes de violence. Ce n’est pas l’essence même du football qui incite ces actes, mais le fait que ce soit le sport le plus suivi en France. Au-delà du plus grand nombre dû aux plus nombreux pratiquants, le moindre fait ou la moindre parole raciste est tout de suite éclairé par le rayonnement médiatique. Prenons l’exemple du rugby, un sport dont le nombre de licenciés et de supporters augmente d’année en année ces temps-ci. Les associations contre le racisme et l’homophobie s’accordent à dire que cette augmentation est accompagnée d’une hausse des actes de violence recensés dans les stades. Le troisième levier d’action est donc la prohibition des paroles racistes ou homophobes dans les stades. En se basant sur la même mécanique que l’effet de masse, il faut garder à l’esprit que la plupart des gens proférant des insultes par exemple ne le font que par effet de groupe, et ne sont pas eux-mêmes racistes ou homophobes. Savoir dire non ou savoir dénoncer de tels actes, c’est aider les victimes d’une part, mais peut-être aussi faire germer l’idée dans d’autres têtes que tout le monde peut agir.

Ces trois leviers semblent bien-sûr anecdotiques, mais il faut croire en l’effet papillon. Une petite action peut en mener une autre, et le nombre d’actes recensés est en augmentation. Cela ne veut pas dire que le nombre d’actes racistes ou homophobes augmente, mais que les gens prennent conscience qu’il faut les révéler. Il ne faut donc pas hésiter à ajouter sa pierre à l’édifice, et commencer à lutter à son échelle, pour pourquoi plus tard recevoir un LICRA d’or, récompense accordée tous les mois aux plus méritants. C’est le moyen le plus efficace pour que le sport reste, comme le dit M. Kenigsberg, « un modèle d’intégration, de mélange des cultures et de mixité sociale ».

S.

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