Guivarc’h : « Je peux pas, j’ai piscine »

Stéphane Guivarc’h est devenu malgré lui une légende du football. Un peu comme Chuck Norris est une star pour les « geeks », la bulle media en a fait le chat noir du football français. C’est presque devenu une expression consacrée : on peut rassurer un joueur mauvais en lui disant « ne t’inquiète pas, tu es tout de même meilleur que Guivarc’h ». Pire que ça, il est même officiellement élu « pire attaquant de la ligue anglaise » par le Daily Mail en 2009.

Ce titre résonne comme une vengeance des anglais suite à sa participation à la finale de la coupe du monde qu’ils considèrent injustifiée. Il est donc devenu presque plus célèbre après sa retraite que pendant sa carrière de joueur. Cette solide réputation de « loser » bien accrochée à lui, il a en plus décidé de se réorienter dans la vente de piscines et de produits de balnéothérapie près de Concarneau. Il n’en fallait pas plus à ses détracteurs pour ajouter à sa légende.

Pourtant, tout cela peut sembler un peu sévère envers l’ancien attaquant international. Il a terminé deux fois meilleur buteur de division 1 avec Auxerre en 1999 et 2000, et sa place en coupe du monde était méritée. Pire, l’affront du Daily Mail alors qu’il n’est resté que trois mois à Newcastle ! Stéphane Guivarc’h fait simplement partie de ces gens qui, sans le vouloir, sont victimes d’internet et de l’hyperréactivité des réseaux sociaux.

Parallèlement à son activité dans la vente de piscines, il est entraîneur de l’US Trégunc depuis 2007. Il fait d’ailleurs monter le club de deux divisions en deux ans pour le mener en division supérieure régionale. Il a également été consultant pour Canal + et directeur sportif de l’En Avant Guingamp. Des performances honorables, mais qui ne fait malheureusement pas autant de bruit que le reste.

Stéphane Guivarc’h suit donc un après carrière atypique, avec sa double casquette d’entraîneur et de représentant commercial. Il a su encaisser cette mauvaise réputation pour désormais vivre de son ancienne passion tout en gardant une autre activité professionnelle.

S.

Tony Parker vu par les américains

Tony Parker est de retour à San Antonio. Le meneur des Spurs a posé ses valises mercredi dans la ville texane, après un mois et demi d’intérim à Villeurbanne pendant la durée du Lock-out. Le français manquera évidemment à l’ASVEL, et il est indispensable à son équipe à San Antonio. Mais a-t-il manqué aux supporters de la NBA ? Est-il aussi populaire outre-Atlantique qu’en France ?

A son arrivée au Texas en 2001, personne ne le connaît. Repéré l’année d’avant lors du Nike Hoop Summit, il est drafté par les Spurs pour la saison 2001-2002, mais s’apprête à débuter sur le banc des remplaçants. A 19 ans, il joue 20 minutes et affiche de belles statistiques (9 points, 3 rebonds, 3 passes décisives) et gagne rapidement sa place dans le 5 majeur. « Au début, je suivais son parcours parce que les joueurs français sont rares en NBA » raconte Whitney Amechi, arrière titulaire dans l’équipe des Highlanders de l’University of California Riverside (UCR), et fan absolue des Spurs. Trois titres de champion NBA plus tard (2003, 2005, 2007), il a acquis une belle réputation. « Difficile d’ignorer un joueur élu MVP des finales 2007, et si souvent dans le NBA All-Star Game. C’est l’un des joueurs les plus rapides, et son tir à trois points a beaucoup progressé » nous explique Christian Kindschy, l’un des « coaches » de l’UCR.

Sa vie privée a aussi beaucoup aidé à le rendre public. Il rencontre sa future femme Eva Longoria, actrice montante à l’époque, dans les vestiaires à la fin d’un match des Spurs en 2004. « C’est sa relation qui en a fait une vraie personnalité. Il n’a jamais atteint le stade de star NBA à part entière. C’est la popularité de son couple qui l’a fait connaître de tous. Au lycée, les filles parlaient de son côté people, et les garçons discutaient de ses performances» nous raconte Corentin Balet, pivot au Lakeview Christian Academy dans le Minnesota.

Ses déboires sentimentaux n’ont-ils donc pas affecté son image ? « En tant que femme, je n’ai pas du tout apprécié cette histoire. Aux Etats-Unis les gens sont très sensibles à ce genre d’affaire » nous dit Whitney. Mais son absence pendant près de deux mois a peut-être fait oublier son divorce. « C’est possible » acquiesce Whitney, « pour être franche, ce n’est pas le joueur de NBA dont j’attendais le plus le retour. Il était loin des débats durant deux mois, et du coup il m’était un peu sorti de la tête » Loin des yeux, loin du cœur, comme on dit…

Tony Parker a donc une nouvelle réputation à bâtir de l’autre côté de l’Atlantique, et son absence loin du conflit entre les joueurs et les présidents des franchises lui permettra peut-être de ne faire parler de lui que pour des aspects sportifs. Mais le natif de Bruges a pris l’habitude des flashes et des projecteurs. Vice-président de l’ASVEL, de multiples contrats publicitaires, un album de rap, une émission de radio… Tony Parker est devenu une marque, et pour exister, une marque a besoin de faire parler d’elle.

S.

Notre sportif de l’année 2011 : Novak Djokovic

Novak Djokovic terminera la saison 2011 sur la plus haute marche du classement. Les masters, comme toujours dernier tournoi de la saison, viennent de s’achever à Londres, et les performances du serbe tout au long de l’année en font l’un de nos nommés au titre de sportif de l’année 2011.

Janvier – Mai : 41 matches, 41 victoires

Comme chaque année, le 1er grand rendez-vous de la saison se déroule à Melbourne avec l’Open d’Australie. Il répond présent en s’imposant en finale face à Andy Murray (6-4, 6-2, 6-3), après avoir notamment éliminé Federer en demi-finales (7-6, 7-5, 6-4). Un affrontement d’une grande intensité entre le serbe et le suisse, le premier de la saison en tout cas. Quoi qu’il en soit, « Nole », comme on le surnomme, remporte le premier tournoi du grand chelem de l’année, et s’impose en Australie pour la deuxième fois de sa carrière après 2008.

La suite de son début de saison est tonitruante : il conserve son titre à l’Open de Dubaï, puis remporte les Masters 1000 d’Indian Wells. Il passe à cette occasion deuxième au classement ATP.

Djokovic est intouchable, il gagne les masters 1000 de Miami, puis l’Open de Belgrade, puis les masters 1000 de Madrid, puis les masters de Rome. Fin mai, il est déjà assuré d’être qualifié pour les masters de Londres en fin d’année. Un record.

Il arrive donc à Roland-Garros avec une statistique impressionnante : en 2011, 37 matches, 37 victoires. A la fin du tournoi, il peut dépasser le record de John McEnroe et ses 42 victoires consécutives. A la fin du tournoi, il peut devenir numéro 1 mondial. Mais le destin en décide autrement, Fognini déclare forfait en quart, et le match ne peut compter dans son décompte de victoire. Il restera coincé à 41, car Roger Federer l’élimine en demi-finales. Nadal reste 1er au classement ATP, et Djokovic n’égale pas le record.

Wimbledon, le passage du flambeau

Finalement il n’aura pas attendu beaucoup plus longtemps. Après un forfait au Queen’s, il s’engage à Wimbledon avec pour objectif de détrôner l’empereur Nadal. Il lui suffit d’arriver en finale. Et la finale, il l’atteint aux dépens de Jo-Wilfried Tsonga. Il devient numéro 1 mondial, et rejoint en finale… Rafael Nadal. Il gagne en quatre sets (6-4, 6-1, 1-6, 6-3), et remporte son deuxième tournoi du grand chelem de la saison.

Sa nouvelle couronne ne le gêne pas plus que ça, et le bulldozer Djokovic ne s’arrête pas. Il ajoute une nouvelle victoire à son palmarès avec les masters 1000 de Montréal. A l’US Open, il réalise un tournoi difficile mais finit par s’imposer en finale encore une fois face à Nadal et en ayant éliminé une nouvelle fois Roger Federer.

Les duels Djokovic-Federer, métronomes de la saison

Il y aura eu 5 confrontations entre le serbe et le suisse cette année. Le résultat parle de lui même : 4 victoires à 1 pour Djoko. C’est une statistique impressionnante compte tenu du standing de Federer, et ces affrontements sont un véritable symbole de l’état de forme du champion serbe cette saison. A Melbourne, il le bat alors qu’il est largement favori, puis juste après à Dubaï. Les deux fois, sans perdre le moindre set. La troisième rencontre a lieu à Indian Wells, et se solde une nouvelle fois par une victoire de Djokovic. Federer n’aura gagné qu’une fois, à Roland-Garros, au terme du match qui restera comme le plus beau de la saison, en termes de technique et d’intensité.

Le symbole fort, c’est que ces rencontres ont probablement été les facteurs les plus décisifs dans la sortie du suisse du top 3 mondial (une première depuis 2004). Novak Djokovic aura donc fait tomber une légende, tout au long d’une saison qu’on ne peut qualifier que d’impressionnante.

Un comportement qui n’agace plus

Autre signe fort, Djokovic est plus apprécié au sein du circuit. En effet, il était souvent critiqué à cause de ses moqueries envers ses partenaires et un comportement parfois antisportif. Mais à 24 ans, le serbe a mûri et les joueurs le connaissent désormais. Son humour et ses pitreries en font un chouchou pour le public et les journalistes, et les joueurs n’en font plus une affaire d’état. Il a haussé son niveau de jeu, notamment sa première balle, et reste un des joueurs les plus difficiles à déborder sur le circuit. Il est complet et spectaculaire, autant de raisons qui en font un personnage très apprécié dans le monde de la petite balle jaune.

Au final, il est clair que Djokovic est une des grandes personnalités du sport de 2011. Il est devenu un vrai champion, qui a mérité sa place de numéro 1 mondial en enchaînant les performances extraordinaires tout au long de la saison, et qui a maintenant gagné le cœur du public. Même si sa fin de saison est moins rayonnante que le début, ses statistiques parlent pour lui : 3 titrs en Grand Chelem, 5 Masters 1000, 70 victoires, 6 défaites. Et il restera quand même le joueur qui aura détrôné la paire Federer-Nadal du haut du classement, et qui aura enchanté la planète tennis durant toute cette année 2011.

S.

David Douillet, des tatamis au conseil des ministres

David Douillet est né le 17 février 1969 à Rouen. Muni de capacités physiques hors normes (1.80m et 80 kgs à 11 ans!), il débute le judo à Neufchâtel en Bray. Un véritable colosse. Il atteindra son gabarit final pendant ses années de sport études à Rennes : 1m96 et plus de 120 kilos. Lors d’une compétition il est remarqué et intègre l’Institut National du Sport et de l’Education Physique (INSEP). Parallèlement au judo, il y décroche un BTS action commerciale. C’est en 1988 qu’il obtient son premier titre en devenant champion de France junior. Il attendra 1991 pour décrocher son premier titre senior. Il dispute ensuite ses premiers jeux Olympiques à Barcelone, en 1992, durant lesquels il termine troisième et ramène donc la médaille de bronze.

La consécration puis la suprématie

Dès 1993, il décroche à 24 ans son premier titre mondial à Hamilton au Canada. Puis ensuite, tout s’enchaîne : titre européen l’année qui suit en Pologne, double titre mondial poids lourds et toute catégorie au Japon, et surtout premier titre olympique en 1996 à Atlanta. En demi-finale de ces Jeux Olympiques, il prend même sa revanche sur Naoya Ogawa, qui l’avait éliminé 4 ans plus tôt à Barcelone. Fait amusant, il ne recevra sa médaille qu’en 1997, les organisateurs ayant malencontreusement échangé les médailles « homme » et « femme » à Atlanta.

Mais deux mois après les JO, un grave accident de moto le blesse sérieusement au mollet et à l’épaule. La fin de sa carrière ? C’est sans compter la volonté de l’homme, prêt à tout pour « redevenir un athlète, puis un champion ». Dès 1997, il remporte les jeux méditerranéens, puis les mondiaux à Paris. Cependant, une nouvelle blessure au poignet l’éloigne des tatamis jusqu’à son dernier grand défi, Sydney.

Sydney 2000, L’apothéose du colosse

Après une triste 7è place aux championnats d’Europe de Bratislava en 1999, tout le monde le dit « finit » et « dépassé ». En revanche, lui y croit : « Sydney ? Il faudrait me couper une jambe pour que je n’y aille pas ». Malheureusement, des problèmes de dos entachent sa préparation physique et même son coach avoue que ce sera compliqué. Mais il est bien présent, et même porte-drapeau de la délégation française pendant la cérémonie d’ouverture.

Pendant la compétition, il se hisse assez facilement en finale où il retrouve Shinishi Shinohara, qu’il avait déjà battu en finale des championnats du monde à Paris en 1997. Pour le dernier combat de sa carrière, il s’impose grâce à un yuko dans la dernière minute, décroche pour la deuxième fois l’or olympique, et devient par la même occasion le judoka le plus titré des championnats internationaux. La légende David Douillet est écrite.

La reconversion en homme d’affaires et consultant

Depuis 1997, il entretient une très bonne image auprès des français. En plus de ces victoires successives dans les dojos, il s’occupe de l’association « Pièces jaunes » avec Bernadette Chirac. Il est également actionnaire d’une agence de voyages, mais celle-ci tombe en faillite en août 1997. Après sa retraite en 2000, il est même impliqué dans une affaire de « complicité et recel de banqueroute » dans cette même agence. C’est la seule zone sombre dans l’histoire d’un homme d’images, mais qui sera vite oubliée tant David Douillet est apprécié.

Parallèlement à sa carrière d’homme d’affaires, il entame une nouvelle vie de consultant, d’abord pour France Télévisions puis pour Canal +. Il est même nommé au sein du comité directeur  de la fédération  française de judo en 2005 et 2008. David Douillet est un homme volontaire, aux multiples facettes, et c’est sans surprise qu’il se lance dans la politique.

 « La politique est une affaire de cœur autant que de raison »

En 2009 il est nommé secrétaire national à la vie sportive de l’UMP. Une reconversion qui surprend évidemment, comme lorsqu’un sportif devient chanteur ou acteur. Sa femme Valérie, elle, n’était pas surprise : « David a toujours voulu s’investir en politique, et quand on le connaît bien, le voir suivre cette voie est tout sauf une surprise ». C’est le début d’une belle ascension pour l’ancien champion, mais il a tout à prouver. « Je sais qu’on ne m’attend pas, mais la crédibilité, ça ne s’acquiert pas, ça se gagne » déclare-t-il sur son blog.

Il est ensuite candidat à l’élection législative, et devient député de la 12è circonscription des Yvelines.  Ensuite tout s’enchaîne : il est élu conseiller général d’Ile de France en 2010, puis secrétaire d’état auprès du ministre en 2011. Et en septembre 2011, il prend la place de Chantal Jouanno partie au sénat, et devient ministre des sports.

Sur son site, il donne sa définition de la politique («la politique est une affaire de cœur autant que de raison») et déclare assumer cette fonction avec sérénité et ambition.

Le petit prodige du judo est arrivé au sommet de la hiérarchie du sport sur le terrain, puis au sommet de la hiérarchie du sport en politique. Une véritable success story pour un homme avant tout apprécié par tous ses compatriotes, qu’il entend désormais servir avec « enthousiasme, et détermination ».

S.