Tour de France : les forces en présence

C’est demain, samedi 30 juin, que s’élancera le 99è Tour de France. Au programme, un parcours qui fait la part belle aux rouleurs puisqu’une centaine de kilomètres de contre-la-montre sont au programme ! Ce profil atypique et les non-participations d’Alberto Contador et d’Andy Schleck ont quelque peu rebattu les cartes… A quelques jours du grand départ de Liège, le Yaourt du Sport décrypte pour vous les coureurs à suivre : pour la victoire finale, pour les sprints et pour ce qu’on appelle les « victoires au panache » (comprenez : les coureurs qui n’ont pour ambition que de remporter une victoire d’étape, au mieux le maillot à pois de meilleur grimpeur).

Tour de France insolite

Victoire finale : le maillot jaune pour un pur rouleur ?

Commençons par les deux noms qui, pour l’heure, se détachent assez nettement.

Cadel Evans (BMC) : L’Australien, tenant du titre, figure parmi les grandissimes favoris à sa propre succession. Depuis son titre de champion du monde en 2009, il est indéniable que le coureur âgé de 35 ans a franchi un palier. Très bon rouleur, bon grimpeur, n’hésitant plus désormais à attaquer (c’est ce qu’on lui reprochait beaucoup dans le passé), il semble avoir toutes les armes pour arriver encore aux Champs-Elysées avec le maillot jaune… Enfin presque. Une nouvelle fois, son point faible, c’est son équipe. Qui pour l’accompagner en montagne ? Burghardt, Moinard, Van Garderen, Hincapie ? Même si on ne doute pas de leur dévotion pour leur leader, cela semble un peu juste, comparé à d’autres… Une chance pour lui que le Tour ne se coure pas encore en tandem. Sa probabilité yaourt de gagner : 70%

Bradley Wiggins (Sky) : On ne parle que de lui, en particulier depuis qu’il s’est imposé sur le Critérium du Dauphiné devançant notamment… Cadel Evans ! On savait que c’était l’un des meilleurs rouleurs du monde (vice-champion du monde en titre de contre-la-montre), il a aussi prouvé, depuis 2009, qu’il savait également grimper et suivre les meilleurs (4è du Tour de France 2009, 3è de la Vuelta 2011, vainqueur du Dauphiné en 2011 et 2012, du Tour de Romandie et de Paris-Nice en 2012 !). Et lui arrive à Liège avec une sacrée armada ! Michael Rogers (2è du Dauphiné), Christopher Froome (4è du Dauphiné, 2è de la Vuelta), Richie Porte (9è du Dauphiné)… Il y aurait eu un CLM par équipe, je crois que la victoire lui était quasi assurée. Cependant, j’ai la sensation que le Britannique et ses coéquipiers auront été en forme un peu tôt et qu’ils ne seront pas assez frais pour le Tour. A voir. Sa probabilité yaourt de gagner : 60%

Les outsiders sérieux :

Tony Martin (Omega Pharma) et Denis Menchov (Katusha) : On en parle moins, mais ces deux-là ont vraiment un coup à jouer sur ce parcours. Tony Martin est champion du monde en titre de contre-la-montre, donc de ce côté, ça devrait aller. Mais pourra-t-il suivre en montagne ? Pas sûr, mais je pense qu’il pourra compter sur une équipe qui sera à son service et pas à celui de Levi Leipheimer, qui selon moi est à moitié cramé. Il pourra aider son coéquipier allemand, au même titre que les Français Chavanel et Pineau. Menchov n’a pas, lui, une équipe extraordinaire, en revanche, il vient d’être sacré champion de Russie de CLM. 2è du dernier Tour de France qu’il a couru (2010), le Russe est souvent placé, mais jamais gagnant. Pour l’instant. C’est la bonne cette fois ? Leur probabilité yaourt de gagner : 40%

Les outsiders à suivre :

Vincenzo Nibali (Liquigas), Ryder Hesjedal (Garmin) et Jurgen Van den Broeck (Lotto) : Tous les trois sont des bons rouleurs, des bons grimpeurs et possèdent une équipe intéressante (Basso (même si je doute de sa capacité à se muer en « coéquipier ») et Szmyd pour Liquigas, Danielson et Vande Velde pour Gamin, Roelandts et Vanendert pour Lotto). Mais chacun a une bonne raison de ne pas remporter le Tour. Nibali a déjà fait un gros début de saison et je ne sais pas si son association avec Basso est une aide ou un handicap. Hesjedal vient de remporter le Giro et je le vois mal faire le doublé. Van den Broeck est jeune et on l’encense pas mal, mais finalement, il n’a jamais rien gagné. Des valeurs sures pour le top 10, mais pour la victoire finale, c’est une autre paire de manches ! Leur probabilité yaourt de gagner : 20%

Les « outsiders » dont on parle, mais en fait, on n’y croit pas une seconde :

Fränk Schleck (Radioshack)Samuel Sanchez (Euskatel)Robert Gesink (Rabobank), et Rein Taaramäe (Cofidis) : 3è l’an dernier, Fränk Schleck a été promu leader de son équipe, profitant (ou pas) du forfait de son frère Andy. Sans son frère, en conflit presque ouvert avec la direction de son équipe, et avec la caravane qu’il traîne pendant les CLM, je vois mal comment il pourrait ne serait-ce qu’accrocher un podium. J’estime à 80% ses chances d’abandonner pendant le Tour. Même s’il ne démérite pas dans l’exercice du contre-la-montre, Sanchez paraît tout de même trop juste pour l’emporter et demeure trop marqué grimpeur pour une édition qui ne l’exige pas. Top 5 envisageable. Quant aux deux derniers, ils sont tous les deux bons grimpeurs et rouleurs, mais ils sont sans doute encore trop jeunes pour viser si haut. Gesink n’a pas encore remporté grand-chose et son équipe n’est pas bluffante. Taaramäe, lui, est estonien et appartient à une équipe française. Soyons sérieux… Leur probabilité yaourt de gagner : 5%

Tous les meilleurs sprinteurs du monde sont là

Quel plateau ! La bataille sera féroce dans les sprints massifs et dans la course au maillot vert, même si on sait déjà que certains n’iront pas au bout de la Grande Boucle pour se consacrer aux JO.

Mark Cavendish (Sky) sera bien évidemment encore LE sprinteur favori pour les arrivées en peloton groupé, mais n’ira sans doute pas jusqu’aux Champs pour la conquête du maillot vert (en vue des JO). La Sky semble bien décidée à jouer sur tous les tableaux ! Le champion du monde en titre devrait être bien lancé lors des sprints massifs, au moins par Bernhard Eisel, très rapide également. En ce qui me concerne, j’espère qu’Edvald Boasson Hagen ne sera pas trop au service du Britannique et qu’il aura l’occasion de tenter sa chance. Attention d’ailleurs au Norvégien qui est un très bon rouleur et qui grimpe pas si mal. Pas de quoi viser un podium, mais il ne sera peut-être pas très loin du top 10.

– Les Allemands André Greipel (Lotto) et Marcel Kittel (Argos) seront également redoutables et disposent déjà de références face à Cavendish ! En effet, ils l’ont tous les deux battu, aux Pays-Bas, lors du fameux Ster ZLM Toer ! Certes, le Britannique a remporté le classement général, mais il n’aura remporté aucun sprint massif, au contraire des deux Allemands. Kittel aura même remporté deux étapes. Et ce dernier n’a que 24 ans ! Leur équipe respective sera sans doute moins puissante, mais s’ils prennent la roue de Cavendish, il faudra bien les surveiller !

– Les Australiens Mark Renshaw (Rabobank) et Matthew Goss (Orica) ont également prouvé qu’il faudrait compter sur eux. Tous les deux anciens « poissons-pilotes » de Mark Cavendish, il leur tient à coeur de montrer qu’ils ont les qualités d’un leader. Sur le Ster ZLM Toer, Renshaw a réussi à devancer le Britannique à deux reprises, sans toutefois remporter d’étape. Il n’en reste pas moins véloce et sera l’atout principal de la Rabobank en plaine, puisque l’équipe néerlandaise n’a pas daigné emmener Lars Boom, pourtant vainqueur d’un sprint sur le Ster ZLM Toer devant… Cavendish ! Matthew Goss, lui, est vice-champion du monde en titre (derrière Cavendish si vous avez suivi) et a devancé le Britannique (bon, il avait chuté…) lors de la troisième étape du Giro, qu’il a remportée. Son équipe, Orica-GreenEDGE, étant moins ambitieuse, il en est le leader et pourra compter sur l’apport non négligeable de sprinteurs comme Baden Cooke ou Stuart O’Grady, tous deux anciens maillots verts du Tour !

– Enfin, on parle moins d’eux, mais il ne faudra pas les oublier : Tyler Farrar (Garmin)Peter Sagan (Liquigas), Alessandro Petacchi et Grega Bole (Lampre). Un peu moins en vue cette année, Farrar a tout de même battu une fois Cavendish l’an dernier sur la Grande Boucle (3è étape). L’Américain a peut-être tout misé sur le Tour cette année. Il pourra compter sur Rob Hunter pour l’épauler. A 22 ans seulement, Sagan représente l’avenir du sprint mondial : trois étapes de la Vuelta l’an dernier, cinq étapes du Tour de Californie ou quatre étapes du Tour de Suisse cette année, son palmarès est déjà long comme une ordonnance médicale de Lance Armstrong (c’est gratuit, je l’admets). Placé cette année dans plusieurs classiques, il va peut-être arriver rincé à Liège. Sans doute dangereux quand même. Enfin, petit choc des générations à la Lampre : Alessandro Petacchi, 38 ans, contre Grega Bole, 26 ans. L’un a l’expérience et a remporté deux étapes et le maillot vert en 2010, l’autre a la jeunesse mais encore peu de grosses références (Grand Prix de Plouay l’an dernier…). Pas certain que cette concurrence soit tout à fait saine.

Petit pronostic yaourt pour le maillot vert : André Greipel.

Enfin, on gardera un oeil, plus ou moins attentif, sur eux

Je ne les vois pas se battre pour un podium ou pour un maillot distinctif (peut-être le maillot à pois pour certains), mais ils ont chacun leur mot à dire pour une victoire d’étape sur leur terrain de prédilection (que ce soit la plaine en échappée, la montagne ou le contre-la-montre). Voici la liste, que l’on pourrait enrichir : Alexandre Vinokourov (Astana) (pas à la retraite celui-là ??!), Oscar Freire (Katusha), Michele Scarponi (Lampre), Alejandro Valverde (Movistar), Simon Gerrans (Orica), Fabian Cancellara (Radioshack), Thomas Voeckler et Pierre Rolland (Europcar) (oui, malheureusement, ce sont bien les seuls Français dont j’aurais parlé, le champion de France, Nacer Bouhanni n’étant même pas là… Je compte surtout sur Pierre Rolland en montagne et pour aller chercher un top 10, même si ce sera très compliqué sur ce parcours pour lui. Voeckler lui parvient toujours à se montrer, mais il serait utopique de penser qu’il peut rééditer son exploit de l’an dernier).

Bon Tour à tous ! On se retrouvera régulièrement pour faire le point et voir dans quelle mesure on se sera bien planté sur ces pronostics !

B.