Je voulais parler de l’Euro, faire un bilan avant les matchs de poule décisifs, adresser un avertissement aux joueurs de France – Suède, mardi prochain, qui seront arbitrés par Proença le Gaulois, l’arbitre qui envoie valser les joueurs… Mais ce matin, j’ai été étourdi par l’annonce du décès de Thierry Roland. Le commentateur que j’ai sans doute le plus entendu, lors des innombrables matchs que j’ai regardés depuis que je suis gosse, a succombé à un AVC à 74 ans. Par conséquent, pas trop envie de me marrer… Il voulait commenter l’Euro 2012, mais une opération l’en empêchait, lui faisant rater une nouvelle occasion de faire un pied-de-nez à TF1, son ancien employeur qui l’avait dégagé sans autre forme de procès, et de retrouver son compère et ami de toujours Jean-Michel Larqué. Et c’est peut-être à ce dernier, bouleversé à l’annonce de la nouvelle, que je pense en premier. Pas sûr qu’il ait le courage de commenter la suite de l’Euro sur M6, même si ce serait un bel hommage…
Pas la langue dans sa poche
Et puis, en fait, j’ai plutôt envie de me marrer. Me marrer en repensant à tous ces moments politiquement incorrects que nous aura fait vivre Thierry Roland. Certains parlent d’un personnage raciste, sexiste, homophobe… Je ne sais pas s’il était tout ça, mais il aura été l’auteur de plusieurs dérapages. Néanmoins, il ne faut pas oublier qu’il était adepte d’un humour pas forcément compris par tout le monde, l’humour des Grosses Têtes, dont il a été chroniqueur durant plus de dix ans… Peut-on aujourd’hui oublier tout ce qui a prêté à polémique ? La fois où, du temps où il présentait Téléfoot, il avait dit de Marianne Mako, chroniqueuse dans l’émission, qu’elle « ferait mieux de s’occuper de torcher le cul des gosses plutôt que de parler de foot » ? Sa réflexion quant au choix d’un arbitre tunisien pour arbitrer Angleterre – Argentine à la Coupe du Monde 1986, choix qui lui semblait bien peu pertinent ? Quand il a affirmé, en 2002, qu’il « n’y a rien qui ne ressemble plus à un Coréen qu’un autre Coréen. D’autant plus qu’ils mesurent tous 1m70 ! » ? Que Vieira, toujours en 2002, se battait contre ses « cousins » sénégalais ? Tout n’est pas pardonnable, c’est sûr, mais aujourd’hui, je retiens davantage que c’était un homme brut de décoffrage, qui parlait la plupart du temps sans faire de détour et sans langue de bois.
Et je veux me marrer en réécoutant l’engueulade mythique entre les deux amis Roland et Larqué durant la Coupe du monde 2002, alors que les micros n’étaient pas éteints : « Le gars, il m’fait, il m’fait les consignes. Attends… Les consignes… J’lui chie dessus moi ! ». Me marrer aussi en revoyant le « clip » de son hit interplanétaire, avec son boys band Carton rouge, « La troisième mi-temps » et ses paroles engagées : « Quel est le moment, que le sportif attend ? C’est la, c’est la troisième mi-temps ! ».
Des phrases choc, genre phrases choc
Me marrer enfin en repensant à ses expressions aujourd’hui devenues cultes. « Fauché comme un lapin en plein vol », « il n’a pas fait le voyage pour rien », « ces deux-là ne partiront pas en vacances ensemble », « il a avalé la trompette », « il lui a mis dans le zig alors qu’il était allé dans le zag »… Autant d’expressions qu’on répète en rigolant devant un match de foot entre potes, des potes qui ont tous écouté Thierry Roland, presque quel que soit leur âge.
A la fin de la finale France – Brésil en 98, il avait dit, moment également devenu mythique, : « Je crois qu’après avoir vu ça, on peut mourir tranquille ! Enfin, le plus tard possible mais… On peut ! ». A la lumière des hommages qui lui sont rendus aujourd’hui par le monde du foot et du sport en général (c’était aussi notamment un grand passionné de cyclisme), je pense effectivement, même si c’est toujours trop tôt, qu’il pouvait désormais partir tranquille.
B.